dimanche 28 avril 2013 - 926e jour


Au Timor-Leste, les infrastructures sont encore celles d’un pays sous-développé ; hors de la capitale, les gens se déplacent dans les remorques des camions sur des routes en piteux état. Alors en partant dans les montagnes jusqu’au village situé au pied de la plus haute d’entre elles, que je tiens à conquérir avant de redescendre aussitôt pour prendre mon avion le 1er, je suis en mission. Déposé à la première heure au dernier carrefour de Dili par un taxi, je trouve donc ma place dans une remorque, sans bâche, sur une vieille banquette métallique. Une fois rempli de 40 passagers au moins, le bruyant diesel se met en branle. Et à 15 km/h, au pas parfois, nous voilà drôlement bringuebalés par les lacets, les nids de poule et les fissures, chacun accroché comme il peut. Quelques-uns essayent bien de communiquer, mais je débute en portugais et leur anglais est à peine meilleur. Je dis souvent que mon périple en Asie est un peu trop facile en termes de confort, mais cette fois je suis servi, et la barbe dans le vent et la poussière, j’en tire même un certain plaisir. A ce rythme, le trajet, à travers une succession de plateaux barrés par des arrêtes anguleuses, dure presque 4h pour 70 km seulement. Comme prévu, je descends sur la place du marché d’un bourg d’altitude, Maubisse ; et comme prévu, il n’y a plus de moyen de transports pour continuer la route. Je jauge un moment la situation, puis j’interroge quelques conducteurs de moto. On me propose d’abord de m’emmener contre 50 dollars US, puis 30, puis 20, jusqu’à ce que j’accepte d’en payer 10. Je m’enfonce donc dans la forêt derrière un jeune homme, mais sa pauvre antiquité a toutes les peines à grimper la pente. Je me dis que j’irai aussi vite à pied, et d’ailleurs, après 2 ou 3 km, mon chauffeur abandonne : tant pis, je continue tout seul. Vers 14h, je quitte l’asphalte pour bifurquer sur une piste caillouteuse : un panneau me précise que le village que je vise est à 18 km. Avec mon sac sur le dos, j’en ai pour 5 ou 6h, ce n’est pas le moment de traîner. Après un moment, Maubisse, loin en contrebas, disparait quand je passe un premier col, pour pénétrer dans une vallée plus étroite, que je traverse en coupant au milieu par les pâturages. Là, assis sur une pierre, je suis du regard le chemin qui contourne une énième vallée, superbe, bien plus encaissée, pour disparaître derrière le col opposé. Il me faut encore deux bonnes heures de marche rapide pour l’atteindre. J’avance bien, mais je suis encore loin, et déjà fourbu. Alors que je reprends mon souffle dans un joli village champêtre perdu dans les nuages, j’entends un moteur : par chance, le chauffeur du camion, qui transporte des meubles, accepte de me prendre à bord. Encore deux vallées plus loin, juste avant la nuit, nous atteignons finalement le terminus, Hato Builico. Isolé au coeur du massif, ce gros village s’étale sur les flancs des montagnes, à 2000 m au-dessus de la mer. Mais le temps presse : je prends mes quartiers dans une ancienne maison bourgeoise portugaise, une pousada mal rénovée, et alors que la nuit tombe, je me dépêche d’aller reconnaître le terrain. Car malgré la fatigue, je compte gravir le mont Ramelau dans la nuit. On me sert une belle assiette de riz et boeuf en sauce, et je file au lit dès 8h30, blotti sous les couvertures.



 

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