Avant
de raconter cette belle journée, je dois préciser que j'ai eu une
excellent conversation hier soir, avec ma copine belge et un charmant
monsieur de soixante ans environ qui partage mon dortoir. Comme il
nous offre un verre de vin, nous nous asseyons avec lui. Il nous
apprend qu'il est un vrai carioca, qui est né et a vécu toute sa
vie à Rio avant de partir à la campagne pour faire du fromage. Son
anglais est approximatif mais qu'importe, ce type est brillant. D'une
voix posé et plein d'humilité, il nous parle de ses voyages, plus
jeune, de ses filles, ainsi que de l'évolution de Rio et du Brésil.
La discussion se prolonge jusqu'à 1h du matin et, fan de musique
comme tous les brésiliens, il me donne plein de tuyaux sur les lieux
où en écouter ; je n'attendais que ça.
Levé
tard donc, je prends tout mon temps pour déjeuner en feuilletant un
National Geographic ; et puis comme le virement de mes toutes
dernières économies est effectif, j'achète mon billet d'avion pour
Madrid, pour 500 euros : départ dans une semaine, le 26. Vers midi
enfin, je décolle, et je poursuis mon exploration de Rio en
remontant depuis le Sud. Les yeux grands ouverts, je patrouille
longuement dans le secteur de Botafogo, situé entre les plages au
Sud et le centre au Nord, et engoncé entre plusieurs pics
granitiques, dont le vertigineux Corovado surmonté du Christ 700 m
plus haut. Ce quartier ressemble à ceux que j'ai déjà vu, tout en
étant un peu moins luxueux. Il y a de grandes avenues, des rues plus
étroites et de vastes places, toutes très arborées et assez
animées. Quelques vieilles bâtisses classiques se retrouvent
cernées entre des grappes d'immeubles immenses. Sur les hauteurs,
une favela aux bicoques bariolées voisine avec un quartier
résidentiel de villas très distinguées. Gauche, droite, droite,
gauche, j'entre ensuite dans un très vaste cimetière où des
centaines de statues d'anges veillent sur les sépultures gothiques.
Je prolonge sur un boulevard commerçant puis escalade une colline
pour prendre une collation au calme. De là-haut, je peux contrôler
tout le chemin que je viens d'accomplir, et de l'autre côté, surgit
d'entre les arbres le fameux Pain de Sucre ; c'est décidé, je vais
aller le voir de plus près.
Comme
toujours, je marche à vive allure, traverse plus lentement une
honorable université, et aboutit à une superbe petite crique
encadré par deux montagnes. Sur le flanc de l'une d'elles, un
sentier s'enfonce dans les bois en direction du Pain de Sucre. La
question ne se pose pas, je m'engage joyeusement, sans même chercher
à savoir combien coûte le téléphérique qui glisse dans le ciel.
Au bout du chemin qui surplombe l'Atlantique, un panneau interdit de
continuer sans un guide professionnel : exactement ce qu'il ne faut
pas me dire. Je commence à grimper mais rapidement la pente devient
impossible : le roc colossal s'élèvent devant moi, incroyablement
vertical, à 400 m au dessus de la mer. Planté juste à l'entrée de
la Baie de Guanabara, il en est la vigie naturelle. En revenant sur
mes pas, je ne peux pas m'empêcher de m'enfoncer dans la jungle en
espérant trouver un passage entre les deux pics. La végétation
n'est pas si dense et après peut-être 1h30 d'ascension, je bascule
en effet sur l'autre versant. La pente est bien trop raide par ici,
alors je suis un sentier qui me conduit au sommet du Morro da Urca.
Puisque le téléphérique s'arrête ici, il y a une grande
plate-forme aménagée, avec plusieurs bars et leurs terrasses
panoramiques, très chers évidemment. Je profite un moment de la vue
fabuleuse et redescend au pas de course.
De
retour à Botafogo, comme j'ai besoin d'un pantalon pour
éventuellement sortir ce soir, j'arpente un immense centre
commercial ultramoderne de six étages, mais j'en ressors bredouille
et retourne à l'hôtel. Là, Sophie, la belge, est disposée à
aller voir ce concert dont nous a parlé ce vieux carioca hier. Nous
ressortons vers 23h pour aller en plein centre à Lapa, le quartier
le plus animé de la ville. Néanmoins, en ce mardi, c'est plutôt
calme. Nous sirotons une bière au pied d'un grand aqueduc où joue
une fanfare composée d'une bonne quarantaine de musiciens, puis nous
flânons dans les rues en bavardant. L'établissement que nous visons
est fermé mais nous effectuons plusieurs haltes devant des bars où
se produisent des groupes. Nous rentrons finalement vers 1h30 : j'ai
dû marcher environ dix heures aujourd'hui, je suis exténué.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire