jeudi 27 septembre 2012 - 713e jour

Ce matin, je pars avec Girish, vers 10h, jusqu’à la station où il descend pour aller au bureau. Le quartier, non loin du centre, est en plein développement : il comporte de vieux bâtiments et des tours modernes et la circulation y est intense. Je me fraye un chemin parmi la foule jusqu’à deux lieux de culte modestes, mais importants du fait de leur ancienneté. Le premier est une petite mosquée blanche qui semble flotter sur la mer, seulement reliée à la terre par une longue passerelle. Le second est un temple hindou à peine visible, coincé entre de hauts bâtiments, où les fidèles se pressent, des fruits et des fleurs à la main en guise d’offrandes. Puis je retourne dans le centre-ville, qui m’impressionne toujours autant, cette fois pour visiter le fameux musée du Prince de Galles. Il est logé dans un vaste et élégant bâtiment de la fin du 19e, très british. Et les collections qu’il propose, tout autant splendides, me donnent d’admirables exemples des arts indiens des deux derniers millénaires. Il est encore tôt quand je décide de rentrer : je suis fatigué et je crois avoir eu un bon aperçu de Mumbai, cette surprenante métropole. Déjà, après quatre jours ici, je me repère sans problème. Ca signifie que l’heure est venue de partir et d’ailleurs, je m’en vais ce soir. En attendant je profite seul du confortable appartement en attendant le retour de ses occupants, entre 20h et 22h. Pour mon départ, Girish fait livrer des pizzas assez semblables à celles que l’on connait au pays. L’attention me touche ; dommage que je n’ai pas eu le temps d’inviter à mon tour mon hôte, à l’emploi du temps chargé. Il faut dire que j’arrive en semaine, mais malgré ça, Girish a su se montrer très serviable. Vers 22h30, je salue tout le monde avant de sauter dans un rickshaw qui me dépose à la gare. Je monte dans un train heureusement équipé de couchettes, puisque j’effectue un trajet de presque 1000km pour 17h ; direction Udaipur, au Rajasthan, dont j’ai prévu d’explorer les trésors pendant deux semaines.






 

mercredi 26 septembre 2012 - 712e jour


Aujourd’hui, comme j’ai encore un programme chargé, je décolle de bonne heure. Comme dans toutes métropoles, les gens s’entassent dans les transports en commun. Certaines rames des trains de banlieues que j’emprunte sont rapides et modernes, avec des équipements tout en inox, d’autres seraient plutôt bonnes pour la casse. Mais elles sont toutes pourvues de dizaines de ventilateurs : vu la chaleur, ce n’est pas du confort, mais une question de survie. Au Nord de la ville, j’embarque dans un bateau qui m’emmène vers une pagode bouddhiste, un dôme gigantesque se terminant en une pointe élancée. Toute neuve, mais reproduisant une antique pagode birmane, elle est entièrement couverte de peinture dorée, ce qui lui permet d’être visible de très loin. Je me recueille un moment à l’intérieur, très épuré, propice à la méditation. Ensuite, à quelques kilomètres de là, je m’octroie une belle balade à vélo dans un parc immense, 100 km2 environ. L’épaisse forêt n’a rien d’exceptionnel, mais pédaler ainsi en pleine nature est quand même très agréable. Au milieu du parc, perché sur une colline, j’explore un réseau de temples et de monastères troglodytes, un site majeur du bouddhisme dans la région. Ces nombreuses grottes furent creusées à partir du 2e siècle avant notre ère et restèrent occupées pendant plus de mille ans. La plupart n’étaient que les simples habitations des moines, mais les plus grandes restent finement décorées de grandes colonnes et de magnifiques sculptures, certaines hautes de 5 ou 6 mètres. Je rends mon vélo trois heures plus tard, bien content de la promenade, mais ma prochaine étape est bien moins réjouissante, puisque je compte traverser Dharavi, censé être le plus grand bidonville d’Asie avec plus d’un million d’habitants. Comme ailleurs, il y a là des rues commerçantes bruyantes, des ateliers étriqués en tout genre, ainsi que des ruelles si étroites qu’il y fait noir comme en pleine nuit. Je me demande encore comment les pitoyables bâtisses tiennent debout. Les habitations sont tantôt de grandes barres d’immeubles moisis et rouillés, tantôt de minuscules cabanes de briques, de tôles et de bâches. La densité de population et la promiscuité sont effrayantes tandis que le degré de saleté est abominable. J’en ai vu d’autres, mais je ne peux pas m’empêcher d’avoir la nausée en longeant un large égout à ciel ouvert d’un noir opaque, pourtant bordé de pauvres maisons. Plus loin, alors que j’étais jusque-là passé plutôt inaperçu, des gamins pouilleux me voient et me font de grands signes en riant. Je leur réponds bien-sûr, en forçant un sourire ; mais en tournant la tête, je serre les dents pour retenir des larmes.





 

mardi 25 septembre 2012 - 711e jour

Ce matin, Girish, qui embauche assez tard, m’accompagne en ville de bonne heure. En train, nous descendons jusqu’à une plage bordée par une longue promenade que j’arpente seul jusqu’à l’extrême Sud. Je traverse des quartiers de bureaux, logés dans des immeubles un peu vieillots. Mais les rues sont agréables, larges et arborées, et peuplées d’hommes en costume (sans la veste) et de femmes en sari bien sûr, mais aussi en tailleur. La mode streetwear occidentale est aussi très présente, tandis que les écoliers portent d’élégants uniformes. Soudain, un grand boum : je ne m’étonne pas de cet accident entre un taxi et un camion, tant le code de la route semble inexistant. Plus loin, je débouche sur la rive Est de la presqu’île, où se trouvent quelques magnifiques bâtiments de pierre taillée, mélange d’architecture anglaise et indienne. Sous l’emblématique Porte de l’Inde, un genre d’arc de triomphe du début du 20e, je salue rapidement une hollandaise rencontrée à Zanzibar, puis j’embarque sur un vieux bateau en bois, direction l’île luxuriante d’Elephanta, à une dizaine de kilomètres, qui abrite des grottes classées par l’Unesco. Creusées par l’homme dès le 6e siècle, elles sont consacrées au culte de Shiva. Dans la plus grande, composée de nombreuses colonnes, les hauts-reliefs représentant les divinités sont fantastiques. Dehors, je gravis les escaliers au pas de course, puis à l’intérieur, je prends le temps d’admirer les sculptures d’une grande finesse. Après une petite sieste sur le bateau, j’arpente le centre historique de l’ancienne Bombay. Les anglais n’ont pas fait les choses à moitié, la richesse du patrimoine architectural est stupéfiante. Au fil des avenues, toujours ombragées par de grands arbres, se succèdent de superbes bâtiments de pierre, d’inspirations diverses, vieux de plusieurs siècles et bien entretenus. L’université par exemple vaut bien une cathédrale, mais le clou du spectacle, c’est sans conteste l’immense gare Victoria, époustouflante. Avec son style néogothique mêlé d’éléments indiens, elle est un parfait exemple de la rencontre de deux cultures. Pourtant, dans ses murs, c’est bien une gare moderne en fonction, où se pressent des milliers de passagers. Autant impressionné par cette ville unique qu’épuisé par six ou sept heures de marche, je regagne le quartier dans un train de banlieue plein à craquer.




 

lundi 24 septembre 2012 - 710e jour


Le trajet depuis Goa vers Mumbai, quelques 500 km plus au Nord, se déroule sans histoire. Le bus, quoique convenable, n’est pas de première jeunesse, et comme je ne bénéficie pas cette fois-ci d’une couchette, je ne dors que par intermittence. Heureusement, mon voisin est un jeune homme sympathique avec qui j’ai tout le temps de papoter pendant les 16 heures que nous passons côte à côte. Le matin, nous approchons donc de la capitale commerciale et financière du pays, l’une des plus grosses mégapoles au monde, 20 à 25 millions d’habitants selon les sources ; dans mon voyage, elle entre dans la même catégorie qu’Istanbul ou le Caire. Depuis la fenêtre, j’observe, aussi loin que la vue le permet, une infinité d’immeubles de qualité variable : d’immenses gratte-ciels de verre, de grandes tours de béton brut ou de misérables empilements de cubes de brique. Et de nombreux autres sont en cours de construction. La circulation aussi se déroule sur plusieurs étages ; des autoroutes se chevauchent, surplombant des rues grouillantes. Parfois, il y a même des passerelles aériennes pour les piétons. Le trafic est dense, très dense, et il nous faut deux bonnes heures pour atteindre les lointaines banlieues Nord, où mon collègue me conseille de descendre avec lui. Seul, je plonge donc dans un désordre indescriptible. Désorienté, avançant au hasard dans une rue noire de monde, j’attrape des biscuits et un jus à une boutique avant de me poser dans un cybercafé. Là, je constate que l’une de mes demandes d’hébergement, envoyées en urgence, a porté ces fruits. J’appelle donc aussitôt Girish : il m’explique travailler jusqu’au soir, mais il me donne le numéro d’un ami qui habite dans le coin. Je m’efforce de comprendre les explications de ce dernier et je parviens à trouver sa très belle maison, dans un quartier résidentiel calme et chic. Thomas est un membre très actif qui reçoit très régulièrement des voyageurs : je croise chez lui un australien sur le départ et plus tard un coréen qui débarque. Il me sert une assiette de riz et du crabe et alors qu’il s’absente, je me permets une longue sieste sur un canapé en cuir très douillet. A son retour, nous bavardons longuement. Charmant et cultivé, la quarantaine, il jouit visiblement d’une belle situation qui lui permet de voyager : le sujet de conversation est tout trouvé. Vers 19h enfin, Pawan, un colocataire de Girish qui travaille à côté, vient me chercher et m’emmène en rickshaw jusqu’à Andheri, un quartier que je qualifierai d’intermédiaire. Dans un joli 3 pièces, je vois débouler les habitants de l’appartement qui rentrent du bureau les uns après les autres. Ils sont 5 à loger là, entre 25 et 30 ans, tous employés dans la finance ou l’informatique. Girish, programmateur, est plutôt réservé, comme ses copains, pas vraiment de joyeux lurons. Mes hôtes sont souvent chaleureux, mais je ne m’attends pas pour autant à ce qu’ils sautent au plafond en me voyant. Même si j’ai l’habitude, je suis toujours étonné, et reconnaissant, de l’accueil qu’on me réserve. Le diner, sous forme de buffet, est servi fort tard et nous nous couchons dans la foulée.

 

dimanche 23 septembre 2012 - 709e jour

J’ai vu ce que je voulais à Goa, il ne me reste qu’à profiter de la plage et je peux m’en aller sereinement ; départ prévu à 19h. Ce matin, je prends donc mon temps, en lisant le journal (en anglais) devant mon thé au lait, ou en regardant les infos de France (sur TV5) sur la télé de ma chambre ; on dirait que je n’ai pas raté grand-chose au pays, toujours les mêmes histoires. Sur ce, je range soigneusement mon sac, que je dépose à la réception, et je file faire un tour express de Panaji. Le centre n’est pas si grand, et en scooter, l’affaire est vite pliée. Je file ensuite vers la côte Nord, où je m’arrête voir un fort portugais. Dominant l’embouchure du fleuve, il servait surtout à approvisionner les navires en eau. Je fais le tour des énormes remparts qui entourent la vaste cour ; rien de transcendant néanmoins, si ce n’est la superbe vue panoramique. Un peu plus loin, je m’arrête à Calangute, une grande station balnéaire composée d’hôtels, de restaurants et de boutiques. La plage, immense, est bondée, et je marche les pieds dans l’eau pendant des kilomètres jusqu’à un autre endroit noir de monde, des indiens surtout, alors qu’il n’y a pas un chat entre les deux. Je reviens donc sur mes pas, et profite de la plage déserte en nageant un bon moment. Après le sport, le réconfort, j’avale un gros plat de riz et de délicieux poissons aux épices ; moi qui croyais connaître le goût du curry, j’ai les papilles qui explosent… Mais comme souvent, je ne suis pas en avance : je fonce à l’hôtel récupérer mon sac, je rends le scooter avec à peu près trois gouttes d’essence restantes, et file jusqu’à la gare routière. Cinq minutes d’avance, j’ai même le temps de m’en griller une avant d’embarquer pour 14h de bus, sans couchette celui-là ; direction Mumbai la géante (Bombay en anglais).



 

samedi 22 septembre 2012 - 708e jour


Après une bonne nuit sous le ventilateur, j’attaque la visite de quelques-unes des plus belles églises de Old Goa, l’ancienne capitale des colons portugais, qui ont régné sur la région pendant plus de quatre siècles. Elles sont grandioses, parfaitement rénovées, l’architecture est variée et originale ; et leur beauté n’ont rien à envier aux églises européennes. Bâties à partir du 17e, elles arborent de nombreuses statues, et renferment des chapelles magnifiques et des autels couverts d’or. Je profite ensuite de mon scooter pour foncer au Sud, où j’inspecte une vieille demeure bourgeoise ainsi qu’un musée de plein air expliquant la vie des paysans d’autrefois. Je retourne en ville en passant par des routes minuscules. Aux abords de l’agglomération, outre la conduite à gauche, les chiens et les vaches, je dois m’adapter à la conduite cavalière des indiens : aux carrefours, pas de stop, pas de feux, chacun semble faire comme bon lui semble sans se soucier des autres ; et les dépassements dans les virages, sans visibilité, sont fréquents. Lors d’un contrôle de police, alors que je suis l’un des plus prudents sur la route, je suis scandalisé par l’agent qui veut me racketter 2000 roupies (30 euros), soit à peu près son salaire mensuel, pour défaut de casque et de permis. Après de rudes négociations, je m’en sors pour le quart de la somme. Je tourne un peu dans les rues commerçantes animées de Panaji, avant de contempler le coucher du soleil sur une jolie plage toute proche, aussi large que longue.



 

vendredi 21 septembre 2012 - 707e jour

 
Je me réveille en regardant le sublime paysage défiler par la fenêtre. Déjà, les alentours de Bangalore étaient très verdoyants, mais la campagne de l’état de Goa est vraiment luxuriante. La forêt tropicale est très dense et très humide, parfois entrecoupée de rizières carrément vert fluo. L’inde fut évidement une colonie britannique jusqu’en 1947, mais Goa resta une enclave portugaise jusqu’en 1961. Panaji, la capitale où je m’arrête, est située sur une presqu’île formée par deux larges fleuves. C’est devant l’un d’eux, sur une terrasse, que je fais le point en prenant mon petit déjeuner. Je viens ici pour trois choses : le patrimoine colonial d’abord, dont plusieurs églises sont classées par l’Unesco ; les fameuses plages aussi, pour goûter à la mer d’Arabie ; sans oublier de voir comment on fait la fête par ici, le nom de Goa étant mythique pour tout fêtard qui se respecte. Puisque tous ces lieux sont éloignés les uns des autres, je décide de louer un scooter, juste devant moi, pour une bouchée de pain. J’arpente ensuite la galerie de la gare routière afin de réserver mon prochain billet de train. Je me fais balader pendant près d’une heure avant de trouver un gentil bonhomme (enfin) qui m’explique que nous sommes en période de vacances et que tous les trains sont complets : je partirai donc en bus. Le gars qui devait m’héberger ayant annulé au dernier moment, il me faut maintenant trouver une chambre pas trop chère. Je repère quelques adresses hors de la ville sur une carte qu’on m’a donnée, mais elle est imprécise et je passe un temps fou à sillonner les environs au guidon de ma monture. Mais le paysage est splendide et j’apprécie grandement de conduire, pour une fois, surtout par cette chaleur, plus de 30 degrés à l’ombre, à laquelle s’ajoute un taux d’humidité étouffant. A Old Goa, je finis par trouver une grande chambre très confortable dans un établissement tout neuf, à un tarif acceptable. Comme il est déjà trop tard pour entreprendre une visite, je profite jusqu’au soir de la vue depuis mon balcon, qui donne sur une rivière bordée de palmiers, de tecks et de flamboyants, habités par des oiseaux multicolores. Après avoir diné à l’hôtel, je file jusqu’à la plage d’Anjuna, 30 km au Nord, où la vie nocturne est réputée. Tandis que je marche sur le sable se succèdent plusieurs établissements, où de jeunes indiens et étrangers s’en donnent à cœur joie. Sous les spots, la plage se teinte de bleu, de violet ou de rouge, tandis que je m’amuse à observer les vagues sous la lumière des stroboscopes en sirotant une bière. Je m’attarde devant une boîte où le DJ joue une très bonne techno à plein volume, tendance trance – hardtek. Soit, tout cela est réjouissant, mais l’esprit des hippies qui a fait la renommée des lieux a disparu depuis longtemps ; j’ai au moins 30 ans de retard…


jeudi 20 septembre 2012 - 706e jour

Comme hier, je me réveille assez tard. Aujourd’hui, une grève générale est décrétée dans tout le pays : les boutiques et les bureaux restent fermés, les bus de ville ne circulent pas. Mais même s’il ne bouge pas de chez lui, Rohit a du travail. Il prend pourtant le temps de bavarder avec moi en cette fin de matinée, puis je pars me balader seul. Non loin de la maison, je fais d’abord le tour d’un grand lac, puis traverse un campus très arboré. Je zigzague enfin longuement dans le quadrillage des rues, résidentielles d’abord, commerçantes ensuite. Elles sont étonnement désertes. Après avoir avalé une noix de coco sur le trottoir, je retourne à la maison. Là, je discute un peu avec le papa, tandis que la maman me sert à manger, et puis vient l’heure de plier mon sac. Vers 19h, en moto, Rohit, toujours très serviable, m’accompagne  jusqu’au bus que j’ai réservé la veille sur ses conseils, et nous nous quittons en nous souhaitons mutuellement bonne chance. C’est la première fois que je voyage dans un bus équipé de couchettes, et le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est très confortable. Ma banquette, en hauteur, mesure 1m80 par 1m20, il y a des rideaux côté couloir et une grande fenêtre de l’autre. J’y ajoute mon oreiller gonflable et regarde un bon film sur mon ordi : grand luxe.

mercredi 19 septembre 2012


Il est déjà 10h quand Rohit me réveille. J’ai passé une nuit aussi longue que la sienne fut courte. Il ne travaille pas aujourd’hui et se propose de m’accompagner toute la journée. Sur sa moto, nous partons d’abord visiter un palais du 17e, résidence secondaire d’un ancien roi et de ses descendants. Le château, d’inspiration anglaise est magnifique, le mobilier est d’époque et les explications et photos permettent de se faire une bonne idée de la vie d’alors. De retour en ville, nous admirons l’admirable palais en bois sculpté du Sultan Tipu Tip, puis nous déjeunons dans un restaurant populaire les inévitables dosa (un genre de galette). L’hospitalité de mon ami est grande et il me faut batailler pour sortir quelques roupies. Après un grand tour dans le centre-ville, Rohit m’emmène dans un grand temple indou, la religion des ¾ des indiens. Celle-ci comporte 3 millions de dieux, et ce temple est dédié à Krishna, l’un des plus importants. La foule se presse, et c’est pied nus que nous suivons les fidèles en file indienne (sans jeu de mot), qui serpente de portes en portes. A chaque pas, ils répètent une courte prière, jusqu’à arriver dans le vaste temple, en hauteur. La file continue et nous passons un par un devant un grand hôtel doré. L’expérience, très spirituelle, me touche, mais la suite est plus terre à terre. Les mains courantes se prolongent pour redescendre et nous obligent à passer par une succession de boutiques : livres sacrés, gadgets, vêtements, restaurants. Je suis déçu par tout ce cinéma et Rohit, qui n’a pas mis les pieds dans un temple depuis 6 ans est d’accord avec moi. Pour nous remettre de nos émotions, nous concluons cette belle journée en sirotant une bière dans un pub à l’occidental assez classe. Alors que je n’arrive pas à lui dire avec précision combien de conquêtes féminines j’ai eu, il m’avoue n’avoir jamais eu de petite amie. Les mœurs sont bien différentes ici, et je lui conseille d’arranger ça prochainement avec une jolie australienne.



 

mardi 18 septembre 2012



Il fait encore nuit lorsque j’atterri à Bangalore, au Sud de l’Inde, 32e pays de mon expédition. L’Inde, si grande, à l’histoire si riche et aux cultures si variées, c’est déjà un monde en soi. J’ai prévu un mois et demi ici, et je suis certain d’en prendre plein les mirettes. Par téléphone, le jeune homme qui a accepté de m’héberger explique au taxi comment me conduire chez lui. Il habite un vaste quartier résidentiel agréable, très arboré. L’immeuble est assez simple, de même que l’appartement. Rohit me reçoit avec un grand sourire avant de me présenter ses parents, tout aussi aimables. Pendant que nous mangeons une assiette de riz au curry, il m’explique travailler dans un cabinet de conseil en investissement et devoir subvenir aux besoins de ses vieux parents malgré son jeune âge, 26 ans. Heureusement, c’est visiblement un garçon brillant et il gagne bien sa vie. Il va d’ailleurs bientôt continuer sa carrière en Australie, puisqu’il a enfin pu obtenir le visa. Comme il se rend à son travail, il me dépose en moto dans le quartier administratif. Je suis vivement impressionné par le palais du gouvernement de l’état du Karnataka, aussi soigné que gigantesque, ainsi que par le palais de justice, dont les arcades rouges n’en finissent pas. A côté, de larges avenues traversent de grands parcs, et plus loin, j’inspecte un centre commercial grand luxe, logé dans un gratte-ciel ultra-moderne. Puis je marche un bon moment dans le trafic, au milieu des voitures, bus, motos et autre rickshaws (tricycles motorisés). Les rues sont bien moins sales et moins surpeuplées que je le craignais. Quant aux passants, peau cuivrée et cheveux noirs, les hommes portent presque tous chemise, pantalon et chaussures de ville, tandis que les dames sont soigneusement drapées dans d’élégants saris aux couleurs chatoyantes. Je m’attarde ensuite dans le vaste jardin botanique de Lalbagh, planté d’arbres immenses. C’est l’endroit parfait pour une petite sieste. Bangalore, réputée pour être une ville assez riche, notamment grâce à l’expansion de l’industrie du logiciel, est la 4e la plus peuplée du pays avec 10 millions d’habitants. Elle est très étendue, ce qui rend la pression de la foule tout à fait acceptable. Je suis franchement étonné d’arpenter des rues relativement propres et bien ordonnées, ainsi que de ne pas y observer de misère frappante. Dans ce magnifique jardin, où j’écris un peu, je constate que je redeviens une curiosité, de nombreux promeneurs venant gentiment bavarder avec moi. En fin d’après-midi, alors que je n’ai pas de carte, je surestime quelque peu mon sens de l’orientation ; pendant des heures, je me dirige vers le quartier de Malleshwaram et demandant régulièrement mon chemin aux gens qui parlent presque tous un très bon anglais. Je traverse un quartier commerçant bondé, où des boutiques et des centre commerciaux ce succèdent à l’infini. C’est l’heure de pointe lorsque je parviens à une station de bus gigantesque, comme tout le reste. Des centaines de bus fatigués embarquent et débarquent des milliers de passagers. Je monte dans l’un deux, qui me dépose dans le quartier de mon hôte. Je finis par trouver la rue correspondant à l’adresse, que je ne reconnais pourtant pas. On m’indique alors une rue parallèle et je ne regagne la maison qu’à 21h30, épuisé. Je me le rappelle souvent, il va falloir que je me ménage. Rohit est encore au bureau, il n’en rentrera qu’à 4h du matin. C’est donc seul que j’avale le diner servi par la maman.



 


lundi 17 septembre 2012


Voilà déjà le dernier jour de mon court séjour à Maurice. Après les avoir salué, je quitte mes charmants hôtes en fin de matinée, puis je me rends en bus de l’autre côté de l’île, où se trouve l’aéroport, à Mahébourg. Mais je ne peux décemment pas partir d’ici sans profiter de l’une des sublimes plages mauriciennes, mondialement réputées ; des touristes affluent de partout pour en profiter, dépensant en 15 jours ce que j’ai besoin pour voyager 15 semaines. Je vais donc goûter les eaux calmes, d’une incroyable teinte turquoise, au lagon de Blue Bay. Après avoir contemplé le coucher du soleil, je file à l’aéroport en fin d’après-midi où je patiente longuement jusqu’au décollage, tard dans la soirée. Tandis que je traverse une nouvelle fois l’équateur, l’excitation monte : demain, j’attaque un très gros morceau de mon voyage, l’Inde.
 

dimanche 16 decembre 2012

Tandis que nous prenons le petit déjeuner, thé au lait et pain, Brian et Joanna émettent le souhait de m’accompagner, avec le petit Eliel pour ma balade du jour. Dans un bus usé, nous nous rendons d’abord dans le merveilleux jardin botanique de Pamplemousses. Initié dès le milieu du 18e siècle, il abrite aujourd’hui une très belle collection de végétaux des quatre coins du monde. On y observe notamment des dizaines d’espèces de palmiers, des arbres majestueux plusieurs fois centenaires et des fleurs à foison. Puis nous allons visiter le magnifique château de Labourdonnais, plutôt une très belle demeure coloniale du 19e, superbement restaurée. Entourée de colonnes et d’une large varangue, on y découvre, dans les différentes pièces, la vie d’autrefois grâce au mobilier d’époque, aux explications et photos. La promenade se conclue dans le verger pour une dégustation de rhum. En rentrant, j’observe le paysage, nettement moins spectaculaire que La Réunion, mais avec une touche africaine en plus, du fait des champs et des manguiers, ainsi que des habitations plus sommaires. A la maison, comme la veille, la soirée s’écoule paisiblement : après un moment à réviser mes leçons, Maurice bat la France aux échecs 2 à 0, tandis que la Suisse reste neutre.



samedi 15 septembre 2012


Lorsque l’appel pour le petit déjeuner me réveille, le bateau est déjà immobilisé devant Port-Louis, capitale plutôt modeste de l’Ile Maurice. Le débarquement s’effectue lentement, de même que les obligations douanières, puisque l’agent prend un malin plaisir à fouiller intégralement mes affaires. Au petit matin, sac au dos, je traverse la ville encore calme jusqu’à l’appartement de mes hôtes, ¾ d’heure plus loin. Contactés via internet, Brian, mauricien, et Joanna, suisse, 25 ans environ, ont un beau petit métis de presque 2 ans. Comme Brian sort faire des courses, je l’accompagne. Pendant que nous parcourons le centre-ville, mélange de vieux bâtiments en mauvais état et de hauts immeubles modernes, de rues cabossées et de larges avenues plantés de grands palmiers, il m’explique avoir juste terminé ses études de physique, tandis que sa femme enseigne le journalisme. Après un passage dans un supermarché à l’occidental et le marché central haut en couleur, nous rentrons pour le déjeuner auquel la famille est conviée ; les parents de Brian, un cousin et sa femme, de Londres, puis sa sœur et son frère. A table, dans une ambiance chaleureuse, on parle français, créole et anglais, preuve des multiples influences culturelles de Maurice. Plus tard, je pars seul compléter ma visite de la ville. J’assiste d’abord à une course à l’hippodrome, je grimpe jusqu’au fort Adélaïde profiter de la vue panoramique sur la ville et les montagnes, j’entre dans la vaste cathédrale Saint-Louis, de pierres noires et dans la jolie mosquée Jummah, blanche et verte, je traverse les quartiers chinois et colonial ainsi que la Place d’Armes, avant de flâner sur le front de mer bien aménagé, où trônent des centres commerciaux luxueux. De retour à la nuit tombée, je passe la soirée à bavarder avec mes hôtes, qui s’avèrent être des gens calmes et adorables.

vendredi 14 septembre 2012




Mon séjour à La Réunion se termine en beauté. Lundi, lors d’une sortie en mer avec les amis de Ben, j’ai pu observer des baleines à bosses. Nous en voyons de nombreuses toute l’après-midi et à 3 ou 4, nous plongeons plusieurs fois pour les voir sous l’eau. Le dernier essai est le bon : malgré l’eau un peu trouble, j’aperçois un mastodonte et son petit glisser à une dizaine de mètre ; frisson garanti. De retour sur la petite vedette, nous suivons une famille pendant un long moment, qui nous fait l’honneur de quelques cabrioles. L’une d’elle nous fait même un grand sourire en sortant la tête de l’eau. Mardi et mercredi, Ben et moi partons en randonnée pour la dernière fois, avec la tente et à manger dans nos sacs, dans le cirque de Mafate. Sans route, habité par seulement quelques centaines de villageois, il y règne une ambiance de monde perdu, malgré la proximité de la civilisation. Et les paysages, escarpés à l’extrême, sont époustouflants.




Ce vendredi, je reprends enfin la route après 4 mois ici. Je suis prêt, en pleine forme, parfaitement préparé et sur-motivé. Pas stressé le moins du monde, je passe tranquillement la matinée avec Ben et je plie soigneusement mon sac. Puis je salue mon ami qui me laisse à Saint-Pierre, là où il m’a récupéré 4 mois plus tôt. Je file au Port en stop et embarque sur le même bateau qui m’a amené de Madagascar. Sur le pont, je passe la soirée avec un espagnol, un mauricien  et un réunionnais, qui partagent amicalement rhum et bière. Cette fois, c’est sûr, c’est reparti.