Réveillé
au beau milieu de la nuit sur mon canapé étriqué, j'ai eu grand
peine à me rendormir à cause de pensées qui n'en finissaient pas
de fuser dans mon esprit. Je me réveille finalement tard, vers 10 h,
tandis qu'un gars est attablé dans le salon. Le colocataire mexicain
de Maria m'offre gentiment un café, nous bavardons poliment puis
Hermès retourne à ses travaux. En silence, j'écris un peu derrière
lui avant de me motiver à sortir. Il fait toujours aussi froid
dehors, surtout en short, et j'ai rapidement les pieds mouillés à
cause de la pluie fine qui traverse facilement mes vieilles godasses.
Rompu
à l'exercice, je commence par me rendre Plaza Mayor, entrevue hier.
Rénovée en 1690, elle reste l'un des symboles historiques de
Madrid. Majestueuse, elle est entourée de bâtiments semblables,
trois étages de teinte ocre surmontés de plusieurs tours gothiques.
Je tourne un moment sous ses grandes arcades de pierre, à l'abri,
afin de choisir par laquelle des six portes je vais sortir. Je
continue en me perdant au hasard des vieilles ruelles ponctuées de
nombreuses petites places typiquement espagnoles, vraiment charmantes
avec toutes ces vénérables demeures et ces arbres aux couleurs de
l'automne ; tiens, il y avait longtemps que je n'avais pas vu de
platanes. Plus loin, j'atteins les jardins très soignés de la Plaza
de Oriente, qui fait face à l'immense cathédrale néoclassique , du
20e siècle, et au colossal et somptueux Palacio Real, qui fut bâtit
au 18e pour concurrencer Versailles. Je poursuis jusqu'aux fontaines
de la très vaste Plaza de Espana, qui ouvre sur la grandiose Gran
Via, l'artère principale du centre-ville. Très large, elle est
encadrée d'édifices monumentaux du début du 20e, impressionnant
mélange d'architecture Renaissance, Haussmannienne et surtout Art
déco. C'est sûr, Madrid est une ville superbe, très bourgeoise
aussi, même si la crise touche durement le pays. Pourtant, j'y
déambule comme un automate, porté par l'habitude et mes jambes de
feu, mais en fait je n'y suis pas vraiment ; j'ai déjà la tête
ailleurs. Au fond, je m'en fiche de Madrid, je suis sur la réserve
depuis un moment et je dois terminer le voyage.
Je
déjeune dans une grande brasserie où pendent des dizaines de beaux
jambons, puis j'entre dans une boutique élégante pour enfin acheter
un pantalon. Je zigzague encore dans de longue rues piétonnes en me
serrant sous les porches des grands magasins, puis je rentre au chaud
dans l'un des plus fameux musée du Monde, le Prado. Cet immense
édifice du début du 19e abrite les collections pléthoriques des
rois, amassés depuis des siècles. Il est si grand et si riche que
j'y reste trois bonnes heures à admirer des toiles des plus grands
maîtres d'Europe, dont Botticelli, Raphaël, Caravage, Bosch,
Brueghel, Rembrandt, el Greco et j'en passe, ainsi que de nombreux
chefs d'oeuvre des espagnols Velasquez et Goya. J'y prends donc une
monumentale leçon d'art classique, à tel point que j'en ressors
sonné. Epuisé aussi puisqu'à 19 h, j'ai marché pendant près de
huit heures. Alors je retourne vers le quartier de Maria, que je
finis par retrouver dans la rue. Je l'attend dehors pendant qu'elle
va nager à la piscine puis nous allons au supermarché, où
j'insiste, comme toujours, pour payer l'addition. A la maison, je
l'aide à tartiner quelques tapas et à ouvrir les bouteilles, puis
son petit ami se pointe. Lui aussi travaille dans le cinéma et m'a
l'air d'être un bon garçon. Tout deux forment un couple charmant et
font l'effort de parler anglais. Puisque j'ai acheté un billet
d'avion pour Paris, décollage demain, je fête avec eux mon dernier
jour hors de mes frontières. La soirée s'écoule paisiblement, très
agréable, alors qu'ils me questionnent sur mon interminable route :
pas de problème, j'ai suffisamment d'anecdotes pour ne pas me
répéter pendant des jours et des jours.
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