lundi 24 novembre 2014 - 1500e jour



Après avoir vu les plus grands bidonvilles d'Afrique à Nairobi, et d'Asie à Bombay, je tiens à traverser le plus vaste d'Amérique, Rocinha, qui s'étend à l'Ouest du quartier huppé de Leblon. Je descends du bus juste à l'entrée et je m'y infiltre. De longue date, c'était une zone de non-droit où les gangsters régnaient en maître, mais il a été « pacifié » par les unités du BOPE, le GIGN local. Néanmoins, la tension reste palpable, comme en témoigne ce jeune gars qui déambule avec un revolver à la main ; alors je fais profil bas, la casquette bien vissée sur la tête. La zone, occupée par des dizaines de milliers de gens, est très entendue et il me faut deux longues heures pour en ressortir à l'opposée. C'est une ville dans la ville, le tiers-monde au coeur d'une cité opulente. Bien sûr le plat n'existe pas dans le coin, quelques petites rues donnant accès à des milliers de ruelles extrêmement étroites, qui ne voient jamais le soleil. Il y a bien de petites boutiques et des bars, mais l'ensemble est clairement insalubre avec des déchets partout et des égouts ignobles qui dégoulinent entre les habitations. Il y a tant de monde que je passe inaperçu, même si j'aboutis maintes fois dans des culs-de-sac. Je trouve finalement une issue qui débouche sur le quartier de Sao Conrado, où une large autoroute sépare des immeubles de standing moyen d'une longue et belle plage, conclue par des hôtels de luxe. Rio est vraiment la ville de tous le contrastes.












Je grignote sur la plage puis j'entreprends de traverser le parc national de Tijuca, la plus grande forêt urbaine au monde et dernier vestige de la forêt atlantique. Une petite route abrupte grimpe en lacet au milieu d'énormes montagnes, comme les gigantesques Pedra da Gavea et Pedra Bonita. C'est clairement la jungle, et je monte à un rythme soutenu dans cette végétation dense. Comme j'ai un long chemin à faire, je reste sur cette route au bord de laquelle des gens fortunés possèdent de belles villas protégées par de hauts murs et des gardiens. En effet, la forêt est immense et il me faut plusieurs heures pour atteindre le sommet. Plus loin au Nord, un petit quartier chic aux allures de village s'étend dans une vallée encaissée que l'altitude rend plus fraîche. Je continue à descendre tandis que l'urbanisation reprend peu à peu ses droits en suivant la même logique qu'ailleurs : des favelas sur les pentes les plus escarpées, puis plus bas de vilains immeubles, puis des zones commerciales et des buildings plus hauts et plus élégants. Les alentours sont très verdoyants et je continue à avancer malgré la fatigue. Ce n'est qu'après sept heures de marche, pour une trentaine de kilomètres, que j'entre dans un station de métro qui me ramène chez moi. Epuisé, j'y passe une soirée paisible parmi l'équipe que je connais bien désormais, et les autres qui ne font que passer comme les milliers d'autres visages que j'ai déjà croisés dans les mêmes conditions.





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