mardi 5 mars 2013 - 872e jour

De bon matin, Sutardi et moi partons sous une forte pluie à la découverte de Jogyakarta. 1000 ans plus tôt, la région vit s’épanouir deux puissants royaumes hindouistes, et plus récemment, elle fut le foyer de résistance aux colons. Aujourd’hui centre culturel et universitaire de Java, cette cité d’environ 700 000 âmes a su conserver des dimensions humaines ; aucun building ne dépasse de la ligne d’horizon, joliment dessinée par les toits de tuiles. Au loin, seul veille le gigantesque volcan Merapi, encore meurtrier en 2010. Et puisque le Sultan demeure un personnage très respecté, nous commençons par son palais, le Kraton. A l’entrée, on est accueilli par un orchestre complet : trois vieilles dames chantent, accompagnées par une dizaine de musiciens frappant subtilement sur des séries de cloches ou des xylophones. Comme ailleurs en ville, même si le site est vaste, il n’abrite aucune construction démesurée. Mon ami, qui promène chaque fois ses nombreux visiteurs, joue le rôle du guide. Il m’explique que chaque sultan a fait bâtir un nouveau bâtiment ou rénover un autre, si bien qu’une succession de maisons blanches, de plain-pied et sans faste, entourent une grande cour. Seul le bureau du patron, sans mur mais entièrement vitré, aux boiseries finement peintes et sculptées, rappelle son rang. A quelques pas, tandis que l’averse faiblit, nous traversons les ruines d’une vaste résidence royale ravagée par un tremblement de terre. Derrière, le palais des eaux est par contre parfaitement restauré : du haut de sa tour, le souverain épiait le bain de sa quarantaine d’épouses. Toujours à proximité, nous arpentons les couloirs d’une singulière mosquée sous-terraine, ainsi dissimulée aux envahisseurs. Et après cette belle promenade historique, derrière mon guidon, je m’adapte à de nouvelles règles de conduite, c’est-à-dire aucune. Avec joie, je dois me faufiler entre des centaines de motos, des bicyclettes surchargées et de vieux rickshaws à pédales. Nous stoppons alors au bout de l’avenue principale : pour un européen, elle n’est qu’une simple rue commerçante, mais pour un indonésien, c’est les Champs Elysées. J’admets qu’elle est agréable avec son trafic limité, ses larges trottoirs arborés et ses boutiques bien tenues, mais je préfère revenir en coupant par les étroites venelles, bien plus charmantes à mon sens. Nous parcourons ensuite les allées du marché aux oiseaux, qui sont ici des animaux de compagnie très appréciés, puis nous concluons la balade en jouant quelques parties de billard dans un bar. Je convaincs enfin mon comparse de rentrer de bonne heure. Alors que son papa, 65 ans, avec son large sourire édenté, rentre des champs avec son vélo intégralement couvert de rouille, sa maman nous sert le diner. Cette fois-ci, elle a préparé un menu complet, avec du riz évidemment, mais aussi une soupe de pois sucrée, un peu de poulet, des beignets de tofu et les classiques chips maison. Pendant que j’essaie d’écrire, Sutardi et moi partageons notre passion commune : la musique. Nous nous répondons d’un morceau à l’autre et il m’épate en sortant quelques classiques de la chanson française : Piaf, Brel ou encore Brassens.









 
 

 

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