jeudi 7 février 2013 - 846e jour


Dans mon dortoir sans fenêtre, je n’ai aucune idée de l’heure quand un couche-tard me réveille. Dehors, il fait encore nuit et pour cause, il n’est que 4h du matin ; au moins, je partirai tôt. A la superette qui ne ferme jamais, j’achète mon petit-déjeuner que je prends une dernière fois au salon, en observant cette rue que je ne connais que trop bien. Dès 6h30, je prends place au 1er étage d’un bus classieux, et aussitôt installé dans le large fauteuil inclinable, je m’endors. Quand je rouvre les yeux, nous roulons déjà dans les faubourgs de Johor Bahru. Le détroit de Johor, frontière naturelle large d’un kilomètre environ, se traverse en bus via un pont immense très fréquenté : de part et d’autre se trouvent deux gigantesques terminaux routiers gris métallisé, transpercés par d’interminables tunnels et escalators, qui comprennent également les douanes. Je franchis les deux rapidement et sans encombre, et de l’autre côté, je fais mon petit bond réglementaire : 39e pays. Singapour a la particularité d’être à la fois un état, une ville et une île. Sur cette petite terre de 40 km par 20 à la croisée des mondes, cohabitent 5 millions de gens dont plus des trois quarts sont d’origine chinoise et 8% d’origine indienne, tandis que 14% seulement sont malais, le peuple autochtone. Modèle d’urbanisme, c’est aussi l’un des pays les plus développés de la planète, que ce soit en termes d’économie, de santé, d’éducation ou de sécurité. Et l’ensemble est dirigé par un régime très autoritaire et libéral à l’extrême, mais paradoxalement parfaitement transparent et conscient des enjeux sociaux. Sur le premier trottoir, je réalise à quel point l’ordre règne, puisque les piétons en rang attendent sagement le feu vert pour traverser, alors qu’il n’y a aucune voiture à l’horizon. Puis dans le métro aérien, en traversant les banlieues Nord, je constate la propreté des lieux. Au milieu de parcs aux pelouses impeccables, des dizaines de grandes barres d’immeubles se succèdent. Elles sont quelconques, mais les peintures sont irréprochables ; pas une seule trace de moisissure malgré le climat. Et dans les rues, il ne traîne pas le moindre bout de papier. Je descends alors à une gare aux finitions minutieuses, surveillée par des dizaines de caméras ; partout, des panneaux recensent les interdits en quatre langues. Dans ce monde excessivement aseptisé, j’ai la fâcheuse impression d’évoluer dans le livre de Georges Orwell, 1984. Encore un trajet en bus, et je parviens dans un quartier bourgeois, devant la jolie petite maison de Weizhong, contacté sur internet. Après m’avoir installé dans sa chambre, il m’invite à déjeuner dans un proche restaurant indien. Etudiant en droit de 22 ans, il a déjà eu l’occasion de voyager en Asie du Sud-Est, ce qui lui a permis de comprendre à quel point son pays est avancé, mais aussi un peu ennuyeux. Il est d’ailleurs très curieux des détails de mon long périple. C’est un garçon sage et sérieux, mûr pour son âge. En bus encore, il m’emmène ensuite vers le centre-ville, au Sud de l’île. Dans le quartier chinois, aux couleurs pastel des belles maisons victoriennes s’ajoutent les guirlandes et les lanternes du nouvel an chinois qui débute dans deux jours. Les rues sont bondées, chacun venant dans les boutiques faire ses emplettes pour l’occasion. Nous goutons encore une spécialité locale, avant de partir pour Marina Bay, le centre des affaires et vitrine du dynamisme de Singapour. La baie est époustouflante, encerclée de gratte-ciel vertigineux tous plus originaux les uns que les autres, tels les trois énormes tours du tout nouveau Sands Hotel ou l’hallucinant musée des sciences en forme de fleur de lotus. Mais la journée a été bien rempli, je suis épuisé ; nous passons encore sur une passerelle métallique figurant l’ADN humain avant de rentrer nous coucher.











 

1 commentaire:

Cara a dit…

Singapour, le grand modèle du gouvernement mauricien... à mon grand désarroi (nan mais sans blague, l'Ile Maurice couverte de gratte-ciel ? Non merci).

J'adore la photo des lanternes jaunes dans une rue, c'est impressionnant !

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